La Quête du bonheur : Bienheureux…
Ce qui met en route c’est l’amour de Dieu. Sans l’amour de Dieu, l’homme ne garderait pas Sa Parole et n’aurait pas le goût de la mettre en pratique. La parole du Christ culmine dans le sermon sur la montagne. Les béatitudes décrivent le Christ lui-même et à travers lui le mystère même de Dieu et son amour kénotique.
7. Si tu veux…
Les évangélistes donnent à méditer l’histoire du jeune homme riche ( Mat.19) qui s’approche de Jésus pour lui demander ce qu’il convenait de faire pour avoir la vie éternelle. Jésus lui répondit : « si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements ». Le jeune homme lui répondit qu’il s’était conformé à la loi et avait mis en pratique les commandements divins. Mais, poussé par quelque motivation, pressentant ce qui lui échappait, il ajouta : « que me manque-t-il encore ? ». Jésus lui dit alors : « si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens et suis-moi ».
Jésus n’oblige pas cet homme à le suivre mais le renvoie à son désir : si tu veux être parfait. Jésus nous renvoie toujours à notre désir, dans le respect de notre liberté. Le Royaume est pour ceux qui le désirent de tout leur c?ur, de toute leur âme et de toutes leurs forces. La méditation de la Parole, la prière sont là pour nourrir le désir et favoriser son éclosion jusqu’à sa pleine maturité.
Le jeune homme riche n’était pas prêt à accueillir la Parole du Christ, à tout quitter pour Lui. Sans doute, sa méditation ne l’avait pas conduit à préférer les biens éternels aux biens de ce monde, le récit nous dit que le jeune homme s’en alla tout triste car il avait de grands biens. Cet épisode nous questionne sur l’état de notre désir et ce qu’a pu ressentir le jeune homme ne nous est pas étranger. Il avait manifesté à Jésus l’élan de son c?ur. Il désirait suivre Jésus, ayant été attiré par lui, mais l’évaluation de tout ce qu’il devait quitter faisait obstacle à cet élan. Quelle souffrance que d’être livré à un c?ur partagé, qui veut mais ne peut se déterminer, qui sent un appel mais ne trouve pas la force nécessaire pour y répondre. Sa tristesse dût être à la mesure de son déchirement intérieur. La crispation sur les avoirs, les savoirs, les pouvoirs fait obstacle à la venue du Royaume et rend triste.
La tristesse, nous montrent les Pères de l’Eglise, est due à la frustration des désirs autant qu’à la déception du petit moi. Elle révèle un attachement à soi-même et aux choses du monde. Dans la tristesse, on est seul, coupé des autres. Jésus avait invité le jeune homme à se libérer de la crispation par le don : vends tout ce que tu as et donne-le aux pauvres. Donner, c’est reconnaître que l’on a reçu et aimer le partager. Mettre en partage enrichit et fait goûter les arrhes du Royaume.
A Zachée qui était riche, le Christ ne lui a pas demandé de tout vendre mais d’ouvrir sa maison, de pratiquer l’hospitalité et de partager avec ceux qui sont dans le besoin. Il invite Zachée à découvrir une vie nouvelle qui le rendra heureux. C’est la même invitation qu’il adresse à un pharisien lorsqu’il lui dit : « lorsque tu donnes à dîner ou à souper ,n’invites pas tes amis ni tes frères ni tes parents, ni des voisins riches, de peur qu’ils ne t’invitent à leur tour et qu’on te rende la pareille. Mais lorsque tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles. Et tu seras heureux. » (Luc 14/12)
La joie est dans le partage. « il y a plus de joie à donner qu’à recevoir ».
La joie est dans la relation, dans le don de soi. Elle est pour ceux qui acceptent de s’appauvrir selon les catégories du monde, pour s’enrichir de la vie en communion. « Celui qui voudra sauver sa vie la perdra mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la bonne nouvelle la sauvera. » (Mc 8/35)
Le Royaume des cieux est accessible à ceux qui acceptent d’être des perdants en ce monde, de ne pas compromettre leur âme avec les richesses d’iniquité. Accepter de perdre n’est pas humainement possible mais seulement par la grâce de Dieu qui vient en aide à qui le lui demande. Quand un moine fait ses v?ux monastiques, il répond à la question : veux-tu entrer dans l’esprit de pauvreté, de chasteté et d’obéissance par : « oui, je le veux par la grâce de Dieu ». Ce faisant, il entre dans l’esprit de pauvreté en manifestant qu’il ne peut s’appuyer sur ses propres forces mais seulement sur la Grâce divine. Cela lui rappelle aussi que le Royaume des cieux est un don de Dieu qui ne peut se conquérir par les seules forces humaines. Etre pauvre en esprit c’est avoir reconnu ses limites et mis toute son espérance en Dieu. C’est se rendre accessible à la grâce déifiante de l’Esprit et s’émerveiller de tout ce que le Seigneur opère à chaque instant dans nos vies.
Le pauvre en esprit a fait l’expérience dans sa vie que tout est grâce, que tout est don. Là où il ne voyait pas d’issue, ayant remis sa confiance en Dieu, il est devenu témoin de la puissance divine. Bienheureux celui qui a remis son destin et son salut entre les mains du Seigneur, il n’a plus le souci du lendemain mais cueille chaque jour, dans l’émerveillement, ce que le Maître de sa vie lui donne.
Par cette première béatitude, le Christ nous donne la clé du Royaume. Première béatitude qui introduit toutes les autres, qui prédispose à toutes les autres Lesquelles sont autant de degrés vers la joie parfaite. Degrés où est exprimé l’essentiel de l’enseignement du Christ et dont nous poursuivrons la méditation.