La metanoia : Premiers pas sur le chemin de la guérison
Le mot métanoïa est traduit par « pénitence » ou par « repentir », mots devenus suspects en occident tant ils sont entachés d’une spiritualité doloriste. Métanoïa signifie « au-delà du noûs », au-delà de l’intellect, de notre raison rationnelle et se rapporte à un mouvement de conversion ou de retournement par lequel l’homme s’ouvre à plus grand que lui-même en lui-même. Le repentir est une ré-orientation du désir qui s’exprimait par rapport au monde et qui maintenant est orienté vers Celui qui est Source de désir en nous car il est Source de vie.
Par Père Philippe Dautais
4. Les humbles seront élevés
Le repentir nous ré-introduit dans la relation de filiation. Il est renoncement à la tentation maladive à vouloir se sauver soi-même, ce qui selon Saint Grégoire de Naziance est la meilleure façon d’échapper au salut. Il n’est pas tant une recherche d’un dépassement qu’une acceptation libre de notre condition, de nos limites, de notre faiblesse dans le sens où le dit saint Paul : « c’est quand je suis faible, qu’alors je suis fort » (2 Cor 12/10). Se repentir signifie croire en Dieu et non en sa propre suffisance, c’est se jeter dans les bras de Dieu, accepter le pardon divin ou se laisser vaincre par l’amour du Père qui vient à la rencontre du Fils. C’est entrer dans la béatitude céleste, participer à la joie angélique : « il y a plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur repentant que pour nonante neuf justes qui n’ont pas besoin de repentance » Luc 15/7.
Le repentir est le premier don de Dieu sur le chemin de la guérison, aspiration à une vie plus haute, à une spiritualisation. Par Lui et par la grâce de l’Esprit Saint va s’opérer une réconciliation avec le Seigneur qui a fait irruption dans le cœur. La conscience va s’ouvrir, s’élargir et deviendra apte à écouter, accueillir la Parole qui convient à la croissance intérieure pour la guérison de l’âme. La grande rupture avec le monde n’est pas au moment de la mort corporelle mais au moment où l’homme accepte la réalité de la Présence de Dieu avec lui. A cet instant, l’Emmanuel (Dieu avec nous) nait dans le cœur, unit les deux natures (divine et humaine) séparées et opère une re-création de tout l’être. Plus nous approchons de Dieu, plus Il nous révèle nos ombres, lieux des refus de Son amour. Plus nous découvrons l’abime qui nous sépare de Lui, plus s’éclaire notre réalité intérieure, plus s’affermit notre désir de changement. « La metanoïa engage un processus de changement constant de notre être qui s’humilie par sa propre volonté mais ressuscite par la grâce » dit le père Matta El Maskine. S’humilier veut dire ici accepter sa réalité telle qu’elle est, sortir des illusions et de tout à-priori sur soi-même. C’est se dépouiller du vieil homme pour revêtir l’homme nouveau, accepter de mourir à tout mouvement de mort pour une Résurrection. Le repentir est un deuxième baptême, il est une réponse à l’amour d’un Dieu qui s’est humilié jusqu’à la mort sur la croix afin que nous soyons déifiés par Sa grâce.