La metanoia : Premiers pas sur le chemin de la guérison
Le mot métanoïa est traduit par « pénitence » ou par « repentir », mots devenus suspects en occident tant ils sont entachés d’une spiritualité doloriste. Métanoïa signifie « au-delà du noûs », au-delà de l’intellect, de notre raison rationnelle et se rapporte à un mouvement de conversion ou de retournement par lequel l’homme s’ouvre à plus grand que lui-même en lui-même. Le repentir est une ré-orientation du désir qui s’exprimait par rapport au monde et qui maintenant est orienté vers Celui qui est Source de désir en nous car il est Source de vie.
Par Père Philippe Dautais
7. La Métanoïa : éthique de responsabilité
Le repentir implique de prendre la responsabilité de nos paroles et de nos actes. Adam après la transgression du commandement divin, interpelé par le Seigneur, nie sa responsabilité et la rejette sur la femme qui à son tour accuse le serpent (Gen 3/12-13). Attitude de justification, étrangère à l’esprit de la métanoïa, qui enferme l’homme dans les conséquences du mauvais usage de sa liberté et l’empêche de reconnaitre sa réalité intérieure. Rejetant la responsabilité sur l’autre, nous nous posons en victime et échappons à la nécessité de notre propre transformation. C’est le principe de l’aliénation. Je suis celui qui porte les conséquences des erreurs parentales, familiales, sociales, éducatives, culturelles dont il est difficile de se libérer.
Dans l’esprit du repentir, j’accepte de prendre la responsabilité de tout mon passé, puis ne pouvant le porter, je le remets au Christ dans une offrande rédemptrice. Ceci implique tout un travail intérieur pour sortir du refoulement d’un passé que je ne pouvais assumer mais dont la plaie est béante. Sont engrammés en moi toutes les blessures, traumatismes, souffrances de mon passé qui m’aliènent dans mon présent. Accepter de les nommer puis de les remettre à Celui qui est plus grand que moi en moi, c’est passer par la croix pour une résurrection, pour une transformation. Devenu conscient, je suis face à cette question : maintenant qu’est ce que je fais de ma vie ?
Ce faisant, je ne suis plus l’objet mais je deviens le sujet de ma propre histoire. Je cesse d’être un individu et je deviens une personne responsable. Cette responsabilité peut prendre une dimension universelle (voir Luc 13/1-4).
Refusant d’accuser l’autre, un autre regard s’éveille en moi par lequel je perçois ma façon d’être face aux autres, aux situations et aux agressions. Dans cette démarche, où je suis renvoyé à moi-même, va naître un discernement sur ma réalité intérieure pour une désidentification, pour une libération. La Métanoïa introduit un nouveau mode d’existence divino-humain où l’homme n’est plus identifié aux aléas de la vie existentielle où il n’est plus enfermé en lui-même mais où se révèle sa capacité de transcendance qui va le libérer de toute aliénation. Sollicité par Dieu, David reconnait son péché, le confesse, en prend la responsabilité dans un désir de transformation, de renouvellement sur lequel Dieu va s’appuyer pour accomplir l’histoire du salut. Le repentir a su émouvoir les entrailles de Miséricorde du Seigneur. David et Bath-Scheba engendreront Salomon, ancêtre du Christ.
La grande Métanoïa est une pâque, un passage de l’avoir à l’être, ouverture à Celui qui vient vers nous, au jamais vu, jamais connu, jamais expérimenté, à la nouveauté créatrice, en écartant toutes nos conceptions, toute idée de Dieu, qui habitent notre vieille conscience. « Aie donc du zèle et repens-toi, voici Je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte j’entrerai chez lui, je souperai avec lui et lui avec moi » Apoc 3/20.