L’attention
Etre attentif, telle est l’attitude fondamentale du disciple et de tous ceux qui sont en quête de l’Essentiel, en quête de Dieu. L’attention est la condition de l’éveil et le mode qui permet d’accéder à la connaissance et au discernement. Elle est la racine de toute vie spirituelle. L’attention est pour ceux qui s’y exercent un art de vivre, une manière d’être, un mode de relation à la vie même. Il convient donc de s’y appliquer de tout son c?ur, surtout en un temps où tout porte à la distraction et à la dispersion.
Père Philippe Dautais
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9
6. Attention à l’action divine en nous
Ceci nous conduit vers l’autre aspect de l’attention, non plus attention à soi-même mais attention à Dieu en soi.
Dans l’attention à soi-même, il s’agissait de s’affranchir des passions et de résister à l’invasion du monde ainsi qu’à l’emprise du moi. Dans l’attention à Dieu, il s’agit de devenir conscient de la Présence divine en soi.
L’exercice de la vigilance lui-même est soutenu secrètement par la grâce. L’homme de lui-même ne peut rien. « sans Moi, vous ne pouvez rien faire »(Jean 15/5). Saint Grégoire le Sinaïte affirme en ce sens : « Nul, sache le, ne peut maîtriser tout seul son esprit si l’Esprit ne l’a pas d’abord maîtrisé car il est indiscipliné » (8. Les Pères de l’Eglise ont pris soin de préciser que l’on ne peut s’engager sur ce chemin seul, hors de l’accompagnement spirituel, car il y a beaucoup d’écueils. « Celui qui met sa confiance en lui-même et non en Dieu tombera d’une chute vertigineuse » affirme Hésychius le Sinaïte (10).
Etre attentif à Dieu en soi, c’est en premier lieu être attentif à l’action divine en soi. Cette démarche est fondée sur la foi, sur la certitude de la Présence agissante de Dieu en nous. Elle s’ancre dans la conscience que tout progrès spirituel est le fruit de la grâce. Pour cela, le chrétien, le croyant, s’exerce à la disponibilité intérieure afin de laisser agir la grâce. Il se tient dans l’attente de la rencontre.
Or l’attente active signifie l’attention. Etre attentif, c’est se fixer dans l’attente avec la même ardeur que les vierges sages. C’est de la qualité de notre attente, de la qualité de notre désir que naît la qualité de notre attention. Etre attentif, c’est tenir sa lampe allumée et se tenir prêt, selon la parole de l’Evangile de Marc 13/33 : « Prenez garde, veillez et priez car vous ne savez pas quand viendra le Seigneur… »
Ici, la nepsis et la prière se rejoignent et, à l’ultime ne font plus qu’un. L’attention extrême à la Présence du Christ fonde la prière continuelle.(11) Réciproquement la prière fonde dans l’intelligence la nepsis, l’attention extrême.
La vigilance et la prière sont associées dans un seul but : vivre l’union au Père par le Christ dans la grâce de l’Esprit. L’attention conduit à la contemplation. Le but de la vigilance n’est pas la purification mais l’union à Dieu. L’attention à soi et la purification en sont les moyens.