L’ardente recherche de la liberté
Un des points les plus essentiels dans la vie spirituelle, comme d’ailleurs pour toute quête, est l’importance du but. Avant de commencer un projet, il est nécessaire de s’interroger sur la possibilité de sa réalisation. Avant de se lancer dans une pratique, il est bon de discerner la finalité que nous recherchons.
En ce sens, en méditant l’Ecriture Sainte et les écrits des Saints Pères de l’Eglise indivise, il apparaît que la vie chrétienne est l’ardente recherche de « la liberté glorieuse des enfants de Dieu ». La liberté intérieure est décrite comme la pierre d’angle de tout l’édifice spirituel, sans elle, l’accomplissement des commandements divins, l’amour de Dieu et l’amour du prochain, semble impossible.
Les étapes de la purification intérieure, telles qu’elles sont décrites par les Pères, ont pour but l’apathéia ou état de liberté intérieure. Ils affirment qu’il n’y a pas d’amour vrai sans liberté. L’amour est la fille de la liberté.
Père Philippe Dautais
5. Le bien, le mal et perception du réel
Au contraire, l’homme soumis aux passions meurt de ne pas contempler la gloire de Dieu cachée dans les êtres et les choses, enfermé qu’il est dans l’extériorité et la chosification.
Par compensation, nous avons vu que les passions n’arrêtent jamais de produire des images pour s’en nourrir, que les passionnés ont une vision déformée de la réalité en fonction de leurs projections. La chute dans les passions, cet asservissement aux réalités sensibles, est un enténébrement de l’intelligence, un obscurcissement des facultés de l’homme et une perversion du jugement.
Les passions empêchent le discernement et amènent une confusion entre le bien et le mal. Dans l’état d’exil, ce sont les intérêts et les plaisirs individuels qui deviennent le critère du bien. Est bien ce qui est agréable et profitable. Est mal ce qui procure un désagrément ou une perte.
Bien et mal sont donc définis subjectivement à partir du désir sensible et en fonction du plaisir recherché. L’homme appelle bien ce qui lui paraît bien en fonction de ses propres critères et mal ce qui lui paraît mal en fonction de sa subjectivité.
Par exemple, l’homme possédé par la colère lutte pour faire triompher le Bien avec force justifications alors qu’objectivement, il peut faire mal ou faire le mal.
En tout, l’être humain agit selon ses propres critères et selon sa perception de la réalité. Celle-ci est déformée par ses passions. Ainsi l’homme passionné, gouverné par ses passions de convoitise, de colère, d’envie, de haine, de vengeance projette sur le monde ses visions fantasmatiques de la réalité et voit l’autre au travers du filtre de ses passions. C’est là la cause principale de tous les conflits et de toutes les guerres.
Il ne peut y avoir une perception du bien selon Dieu dans un coeur passionné. La purification du coeur est donc le moyen de rétablir une juste perception de la réalité et d’acquérir le discernement quant au bien et au mal. Chaque être humain se doit donc de commencer par la purification du coeur pour trouver la paix puis la faire rayonner autour de lui. Il n’y aura pas de paix dans le monde si les coeurs ne sont pas purifiés des passions.
Tant qu’il y a dans le coeur trace d’attachement, de colère, de jalousie, de jugement, on ne peut goûter la vérité de l’être, la vérité de l’amour. On ne peut voir Dieu, on ne voit que la projection de soi-même, on n’agit pas selon Dieu mais selon sa nature ego-centrique, selon ses intérêts et son plaisir.
La purification du coeur est un chemin de transparence pour sortir du mensonge et de l’illusion. La purification du coeur est purification du regard. Elle est aussi ouverture du coeur et ouverture du regard. Elle suppose une mort à soi-même, un refus de consentir aux passions et un changement de regard sur les êtres et les choses.