Le pardon : pour rompre avec une logique meurtrière
Notre civilisation et bien d’autres avant nous, ont été fondées sur le meurtre. Qu’il nous suffise de rappeler la civilisation égyptienne, l’empire romain, l’empire mongol,…et tous les génocides qui ont eu lieu dans l’histoire.
La logique meurtrière est à l’oeuvre partout, elle éclabousse nos écrans de télévision, nos journaux à tel point qu’elle fait partie de notre univers et alimente la violence et la haine en permanence. Sans cesse il nous est montré combien la violence engendre la violence par la force du mimétisme. La loi de la répétition est à l’oeuvre sans que l’on puisse lui entrevoir un terme.
Est-il possible de briser la logique meurtrière, de rompre avec la fascination du mal, avec l’enchaînement et le déchaînement de la violence ? Est-il possible de sortir de la répétition et de l’inertie du passé, des mécanismes inconscients mis en place par l’enfant blessé qui est en chacun de nous ?
Père Philippe Dautais
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9
7. Le pardon suppose la prière
Le pardon suppose donc la prière, l’appel de la grâce. Il commence dans le c?ur et dans les pensées. Face à l’offense, soit je me laisse emporter par le jugement contre l’autre, par le ressentiment ou par l’auto-justification, soit je m’ancre dans la prière pour l’autre.
Ainsi les anciens proposaient de remplacer la multiplicité des pensées par une prière répétitive qui soit une invocation de la grâce divine dans le c?ur de l’offenseur par exemple : « Seigneur Jésus soit béni dans le c?ur de N… ». N étant le prénom de la personne à qui l’on désire pardonner ou même demander pardon. Cette prière est très efficace et sanctifie en premier lieu celui qui prie.
Dans la prière pour l’autre, il nous est révélé en quoi nous avons à demander pardon ou à pardonner. Il est très important de pouvoir nommer les offenses, nommer les blessures, de savoir sur quoi s’exerce le pardon. Il ne s’agit pas d’être naïf de l’autre ou même de lui trouver des excuses mais de l’aimer tel qu’il est. Pardonner c’est aussi donner à l’autre la possibilité de voir sa faute et de se repentir, c’est aussi l’aider à s’accepter tel qu’il est.
Nommer les blessures de l’enfance, les accepter, autant que cela soit nécessaire, ne suffit pas. Il demeure nécessaire de leur donner du sens, de les intégrer à notre chemin de vie. L’Evangile nous invite à en faire des lieux d’offrande comme le Christ lui-même a répandu par ses blessures offertes la guérison pour l’humanité : « Par ses plaies, tous sont guéris ».
Les blessures qui font de nous des êtres souffrants peuvent devenir des béances par où pénètre la grâce. Elles sont des lieux extraordinaires de conversion et de croissance dans l’amour par la découverte et la reconnaissance des dons de Dieu à mon égard. Puis dans un deuxième temps, elles peuvent devenir des lieux de communion avec tous les blessés de la vie et ainsi m’introduire dans une vraie compassion rédemptrice. « Tes blessures peuvent devenir des fenêtres qui t’ouvriront sur les tourments de tes frères » a pu dire Stan Rougier. Ainsi, le pardon permet de faire de mon passé, des blessures de mon histoire, des lieux de la grâce.