De la prise de conscience à la libération intérieure

Le processus thérapeutique a comme fondement la prise de conscience. Cette capacité est spécifique à l’être humain, elle relève, comme nous l’avons vu, de sa dimension noétique ; elle est donc d’ordre spirituel. Dire cela, dans le contexte actuel qui tend à nier la réalité spirituelle en l’être humain, n’est pas anodin. Il est nécessaire de rappeler que la conscience est d’ordre spirituel et non psychologique. L’esprit est en l’être humain la capacité de poser un regard sur ses états intérieurs et sur ses comportements et de s’en désidentifier. Tous ceux qui ont une expérience spirituelle, quelle que soit leur tradition, connaissent cette posture de l’observateur qui perçoit les pensées et les mouvements de l’âme sans le laisser perturber, troubler ou déséquilibrer par ces mouvements. L’éveil du regard tient une place très importante dans le processus de libération, il sous tend l’éveil de la conscience. C’est pourquoi la clé de la vie spirituelle est la vigilance. Par le fait d’être attentif, on perçoit des réalités que l’on ne voyait pas, on donne soudain une importance à ce que l’on négligeait. La vigilance est la condition de l’éveil du regard et de l’éveil de la conscience.

Le processus thérapeutique a pour fonction de stimuler cette capacité inscrite en chaque être humain. Françoise Dolto avait cette très bonne définition du thérapeute : « Le thérapeute est celui qui prête une oreille à l’autre pour qu’il puisse s’entendre ». Nous pouvons décliner cette phrase sur le thème du regard : « Le thérapeute est celui qui prête un œil à l’autre pour qu’il puisse se voir ».

L’art de l’accompagnement ( étymologie : « cum pane » qui veut dire manger le pain avec, rejoindre l’autre dans son besoin de ) est d’offrir un espace au patient pour qu’il accède lui-même à cette écoute et à cette perception. Qu’il puisse entendre ce qu’il dit et faire confiance à ce qu’il sent. C’est d’une part, lui permettre de retrouver le contact avec lui-même, avec son désir, sa sensation, sa singularité ; et d’autre part lui apprendre à poser un regard clair sur lui-même sans jugement.

Eclairer les ombres du passé, repérer les blessures, les souffrances est certes très utile mais tend à garder le patient dans une certaine dépendance. Le conduire vers l’aptitude à voir et à entendre sans se juger, c’est l’ouvrir sur un processus de libération et lui permettre d’advenir en tant que sujet responsable de sa propre histoire

Prendre conscience, c’est voir ce que l’on ne voyait pas et entendre la parole donnée dans sa signification profonde. Passage des ténèbres à la lumière de l’intelligence, de l’aliénation à la liberté. Ce passage s’accompagne du deuil de nos illusions, de nos croyances et de nos schémas mentaux. Jésus, dans les évangiles, ponctue son enseignement en paraboles par ce refrain « entende qui a des oreilles pour entendre ». Appel à élever le plan de conscience adressé à tous et en particulier « à ceux qui ont des oreilles et qui n’entendent pas et à ceux qui ont des yeux et qui ne voient pas », à tous ceux qui confondent la réalité avec les apparences ou la lumière la lumière avec ce qui brille. Appel à l’ouverture du cœur-esprit, du regard pour accéder à une juste perception du réel.

Mystérieusement, il est un temps pour chaque prise de conscience. Tout se présente comme si l’éveil de conscience advient au moment où la personne est mûre pour l’assumer. L’information qui était là depuis longtemps est perçue au moment opportun.
La prise de conscience ne suffit pas, elle devra être complétée par le fait de nommer.
Pour intégrer la prise de conscience, il convient de nommer ce qui a été vu ou entendu. Nommer est un mouvement de l’intelligence qui permet de sortir de l’emprise de ce qui se jouait en nous malgré nous pour acquérir l’autorité de la conscience sur cet aspect de nous-même mis en lumière.

La parole est ici fondamentale, elle inaugure le processus de désidentification libérateur qui est fondamental. Au deuxième chapitre de la Genèse (2/19), Dieu invite Adam à nommer tous les « Hayoth », toutes les énergies de vie qui oeuvrent en lui pour qu’il accède à la dignité royale. La royauté dans le sens de « régner sur » et non de dominer d’une manière tyrannique et aveugle. Dieu invite l’être humain à intégrer et assumer toutes les énergies cosmiques pour les associer à son ascension spirituelle. Nous sommes immergés dans le vivant, tout ce qui n’est pas vu agit en nous malgré nous, tout ce qui est vu et nommé s’intègre à notre dynamisme de vie. Les capacités de conscience et de parole données à l’être humain sont des clés pour le conduire sur la voie de la liberté.

Orienter vers l’avenir et vers la liberté

S’enrichir du passé et construire l’avenir, tel est l’axe du processus thérapeutique. Nul ne peut faire l’impasse de sa propre histoire. Poser un regard clair sur son passé est une chose, s’en affranchir en est une autre. Cette autre étape suppose un combat intérieur. Il nous est tous arrivé de reproduire, contre notre volonté, des vieux schémas, des comportements erronés, de nous voir en train de répéter des mécanismes de protection que nous connaissons. Ils continuent d’agir en nous malgré nous. Pour s’en libérer, il convient d’exercer une vigilance particulière pour ne pas se laisser surprendre et de mener un combat résolu pour ne pas céder à leur injonction. Ce combat s’enracine dans un « oui » à la vie accompagné d’un « non » à la mort, aux pulsions de mort. Combat pour la vie, dans un refus de complicité avec les pulsions de mort liées aux passions qui agissent en nous malgré nous et nous font dire ou faire ce que l’on ne voulait consciemment ni dire ni faire. Ce combat suppose une décision très déterminée. Il permet d’accéder à la liberté intérieure. Le processus de libération passe par la prise de conscience des conditionnements, des déterminismes biologiques et génétiques, des états d’âme, des blessures pour s’en désidentifier. Il conduit à l’avènement du sujet libre et responsable

Le but du processus

Le but du processus est de construire un avenir qui ne soit pas la répétition du passé mais soit le plein accomplissement de notre être et de nos potentialités.

Ce processus thérapeutique est proposé au Centre Sainte-Croix en 5 étapes dans les sessions nommées « chemin de guérison ». Pour plus d’information voir  l’onglet « le chemin de guérison ».

Père Philippe Dautais